La féminisation des noms de métiers, titres, grades et fonctions, c’est un peu LE sujet sensible de la grammaire française. Sous la pression des féministes, de nombreux mots à l’origine « épicènes » (c’est-à-dire ayant la même forme au masculin et au féminin) ont été féminisés. De leur point de vue, le genre (grammatical) masculin traduit la domination du genre (sexuel) masculin.
Or, grammaticalement, le masculin est le genre indifférencié, asexué, qui correspond au neutre latin (souvenez-vous : templum, templum, templum !). Certains cas n’ayant pas encore été tranchés, on ne sait plus vraiment ce qu’il faut écrire sans écorcher la langue française ni heurter les susceptibilités. Voici deux exemples récents qui illustrent bien cette ambivalence.
Sur l’affiche du film Les Âmes vagabondes, Stephenie Meyer est qualifiée d’auteur sans « e ».
D’après le Grevisse, « auteur s’emploie, traditionnellement, tel quel au masculin pour les femmes, quel que soit le sens. Les directives officielles françaises en faveur de la féminisation laissent le choix entre une auteur et une auteure, qui se répand, surtout au Québec ».
Et d’ajouter : « Il semble contraire au but même des féministes de préférer auteure non distinct du masculin phonétiquement et contraire à la règle traditionnelle à autrice conforme à cette règle et parfaitement distinct ».
En effet, à l’oral, auteur et auteure se prononce de la même façon. Donc les VRAIES féministes devraient plutôt pencher pour autrice, qui se dit en Suisse, et qui est formée sur le modèle instituteur –> institutrice.
Sur son compte Twitter, Laurianne Deniaud se présente comme « cheffe » de cabinet.
D’après le Grevisse toujours, la forme un chef, une cheffe se dit au Québec, « qui a soutenu une option radicale : ajouter un -e à tous les masc. (sauf quand ils en sont déjà pourvus) ; cette option oblige à créer de nouvelles alternances graphiques, comme un chef, une cheffe (la langue ne connaissait que -f → -ve : veuf, veuve) ».
Mais s’il suffisait d’ajouter un « e » à la fin de tous les mots « masculins » pour les féminiser, ce serait trop facile ! La preuve avec les noms médecin, marin, camelot, gourmet, qui au féminin, ont déjà un sens bien défini.
Il resterait bien une solution : créer de nouveaux mots. Après tout, plutôt que de masculiniser sage-femme en « sage-homme », on a bien inventé maïeuticien !