Les néologismes des politiques

Quel est le point commun entre le général de Gaulle, Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal ? Ils ont tous utilisé, durant leur mandat ou au cours d’une campagne, au moins un néologisme.

Qu’est-ce qu’un néologisme ? Un mot nouveau, oui, mais pas seulement : ce peut être aussi un mot existant affecté d’un sens nouveau. Le néologisme est alors ressenti comme tel, il est subjectif.

Or, en la matière, nos politiques ont fait preuve de plus ou moins d’audace. Alors que nos trois présidents se sont contentés de « recycler » des mots désuets avec plus ou moins de succès, Ségolène Royal a inventé de toutes pièces un concept qui a fait couler beaucoup d’encre (et pas que de Chine !).

Que se cache-t-il derrière ces mots oubliés, soudain promis à une seconde vie ? Sont-ils l’objet d’une stratégie de communication bien définie, ou au contraire de la spontanéité, voire de la maladresse de leurs auteurs ? Retour sur quelques bons mots passés à la postérité.

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« La France, elle est » : effet de style ou faute de français ?

Après l’écrivain Christiapupitren Combaz et le journaliste Franck Ferrand, c’est au tour du philosophe Alain Finkielkraut de fustiger, dans un numéro du Point, le parler du président de la République. Et dans son collimateur, la répétition du pronom personnel sujet, qui caractérise désormais les prises de parole de François Hollande. Alors, figure de rhétorique ou maladresse grammaticale ? Décryptage d’un procédé qui divise.

Du langage enfantin au discours élyséen

« La France, elle a des atouts… », « Cette politique, elle coûte à la croissance », « Les résultats, ils tardent à venir » : voici quelques-unes des tournures dont le président Hollande raffole mais qui agacent les amoureux du français. Le jugement de l’académicien Alain Finkielkraut est sans appel : « Cette syntaxe sied aux enfants, pas au chef de l’État ! »

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Discours de François Hollande à Oyonnax : la langue présidentielle est-elle malade ?

« Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément » disait Boileau. Pourtant lundi dernier à Oyonnax, François Hollande a eu bien du mal à prononcer son discours.

Était-ce l’émotion liée à la célébration ? Le fait d’avoir été hué et sifflé dès son arrivée ? La crainte de confondre une nouvelle fois les deux guerres mondiales ? Avait-il simplement la tête ailleurs ? Nul ne le sait.

Mots mangés, écorchés, inventés, sur à peine 20 minutes de discours, la langue présidentielle a fourché une bonne douzaine de fois. Une chose est sûre, ce n’est pas sa verve qui fera remonter François Hollande dans les sondages. Jugez plutôt :

Oyonnax se prononce [Oyonna] et Bourg-en-Bresse [Bourk-en-Bresse]. Pour le reste, l’usage du dictionnaire est recommandé.

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« Limogeage »: histoire d’un nom propre devenu commun

L’info a fait la une de l’actualité la semaine dernière. Delphine Batho, ministre de l’Écologie, du Développement  durable et de l’Énergie, a été limogée du gouvernement.

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« Limoger » : le verbe fait spontanément penser à la ville de Limoges.
Existe-t-il un lien entre les deux ?
Évidemment !

Au début de la Première Guerre mondiale, le généralissime Joseph Joffre décide de se débarrasser de certainsJoseph_Joffre officiers d’état-major. Il les expédie illico à… Limoges.

C’est donc en 1916 que le « limogeage » entre dans l’argot de l’administration militaire avant de se répandre dans le vocabulaire courant.

Aujourd’hui, « limoger » signifie « destituer quelqu’un de ses fonctions, le renvoyer ».

À noter qu’il s’emploie généralement pour des personnes occupant un poste élevé.

Attention cependant à ne pas croire que tous les mots qui font penser à un nom de lieu (toponyme) dérivent de ce nom, comme dans cette histoire drôle que m’a racontée mon beau-père :

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C’est beau, c’est bon, c’est la langue de coton !

Hier, en faisant mes courses, je n’ai pas pu m’empêcher de sourire en lisant les emballages de cette escalope de dinde et de cette préparation pour crème dessert au chocolat.

La belle escalope de dinde le gauloisCreme dessert au bon chocolat Alsa

J’ai souri car je trouve absolument absurde pour une marque de qualifier son produit de « beau » ou de « bon », tant cela semble évident (auriez-vous envie d’acheter une escalope moche ou de manger du chocolat dégueu ? Non ? Bon.).

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« C’est une réforme? Non, Sire, c’est une refondation ! »

« Il ne s’agit pas d’une réforme, mais d’une refondation ». Voilà ce qu’a déclaré François Hollande ce lundi matin à Trappes (Yvelines) à propos du système éducatif français.

Réforme, refondation…c’est kif-kif, non?

Vite, un dictionnaire !

Littéralement, la réforme, c’est le retour à une forme meilleure, généralement antérieure.

Quant à la refondation*, c’est le fait de fonder sur de nouvelles bases. Une « réforme en profondeur », dirons-nous.

Il y a donc bien une nuance dans les propos de M. Hollande : lui, il ne fera pas les choses à moitié, lui, il fera table rase du passé, lui, il ira jusqu’au bout et naturellement lui, il réussira !

Mais quand on en est réduit à jouer à ce point sur les mots, on peut se permettre de douter du résultat…

* Le terme « refonte », propre à la métallurgie est également employé au sens figuré pour caractériser l’action de changer, de remanier. Mais contrairement à refondation, il est dérivé du verbe fondre et non fonder!

Rebelle à la pelle

Après Jean-Luc Mélenchon, ex-candidat à l’élection présidentielle, c’est au tour de Smart de jouer avec les mots « belle » et « rebelle » à travers le procédé stylistique de la personnification (attribution de caractéristiques humaines à une chose).

 

Or, malgré leur apparente racine commune, ces deux adjectifs issus du latin ont historiquement des sens opposés.

Belle est dérivé de bonus qui veut dire « bon » alors que Rebelle vient de bellum et signifie « qui recommence la guerre ».

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Qu’est-ce qu’un « salut républicain »?

Dimanche 6 mai 2012. Un peu après 20h. Sur le plateau de TF1, Rachida Dati transmet un « salut républicain » au candidat victorieux François Hollande. Quelques instants plus tard, à Tulle, le même François Hollande adresse également « un salut républicain à Nicolas Sarkozy qui a dirigé la France pendant 5 ans et qui mérite à ce titre tout [notre] respect ».

Pourquoi ces deux personnalités politiques ne se contentent-elles pas de saluer tout court leur adversaire ? Pourquoi se sentent-elles obligées de qualifier leur geste de « républicain » ?

Ici, l’adjectif ne désigne pas ce qui est relatif ou favorable à la République, comme dans « régime républicain » ou « esprit républicain ». Il ne s’agit pas non plus d’une référence au « salut républicain » pratiqué dans les années trente, bras plié et poing levé, par opposition au salut fasciste. Il sert uniquement à insister sur la magnanimité de celui qui salue l’ennemi. Au fond, on pourrait aussi bien parler d’un salut fair-play. Car rendre hommage à celui qu’on a combattu, sans plus de précision, pourrait apparaître comme l’aveu d’une faiblesse. Heureusement que le ridicule ne tue pas.

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Les organes du débat

À quelques heures du grand débat de l’entre-deux tours de l’élection présidentielle 2012, rappelons-nous celui qui, il y a 5 ans, opposa Ségolène Royal à Nicolas Sarkozy.

Qu’a-t-on retenu de ce débat ? Pas grand-chose, sur le fond comme sur la forme, si ce n’est un jeu de rôle surprenant : un Sarkozy d’un calme olympien (on attendait le « 1e flic de France » prêt à dégainer) versus une Ségolène (la madone de Charlety prêchant « aimez-vous les uns les autres » ) piquante à souhait… et à l’excès.

Durant un monologue qui semble interminable, elle s’emporte contre son adversaire sur la question de la scolarisation des enfants handicapés, mais bizarrement cette colère, qu’elle qualifie de « saine » manque terriblement de spontanéité !

C’est à ce moment qu’elle lâche une réplique aussi surréaliste que le reste : « Je ne m’énerve pas, je suis en colère », en réponse à Nicolas Sarkozy qui l’accuse de « perdre ses nerfs ».

Alors, 5 ans après (il n’est jamais trop tard), je me suis penchée sur la signification de cette phrase qui frise la tautologie en raison de la redondance de ses termes et du non-sens qui en découle.

« S’énerver » / « être en colère », n’est-ce donc pas la même chose ?

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Une campagne peut-elle tenir des promesses ?

En passant devant la dernière affiche de pub pour Skoda, je n’ai pas pu m’empêcher de m’interroger sur la pertinence de leur slogan : « En 2012 découvrez la campagne, celle qui tient vraiment ses promesses ».

Je ne parle pas du fond : il est devenu commun qu’en période de campagne présidentielle, la pub utilise des accroches à connotation politique.  Ici, le slogan est basé sur le double sens du mot campagne, électoral et publicitaire. Cette ambiguïté a fait couler beaucoup d’encre depuis les années 60, époque à laquelle on pensait vendre un homme politique comme un savon.

En revanche, sur la forme, je relève une maladresse de langage.

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