Oasis est sans doute l’une des marques dont les publicités sont les plus appréciées, et pour cause ! La boisson aux fruits sans bulles nous régale depuis plusieurs années avec des jus jeux de mots savoureux.

Pour le plaisir, voici quelques exemples de calembours qui font la popularité d’Oasis : – Les noms des personnages : Ramon ta fraise, Jude Citron, Frambourgeoise, Mangue Debol, Alan Anas, etc. – La signature de la marque : Be fruit, par analogie avec Be free, etc. – Ses répliques mythiques et ses nombreuses accroches qui surfent sur l’actualité  (cinéma, foot…) : Faites du fruit, On va tous mûrir, Pour la beauté du zeste, La vérité si je mangue, Ici c’est Poiris, Fiers d’être mûrseillais, etc.

Oui, mais voilà, sur ses dernières affiches spécialement conçues pour les usagers du métro, Oasis a fait une faute.

fruits_oasis

Si si, je vous assure ! Sur l’affiche ci-dessous, insérée sur le côté d’un distributeur de boissons, on peut voir Enrico l’Abricot brandir une bouteille d’Oasis. Le slogan est le suivant : « POUSSEZ PAS, ON EST PAS PRESSÉ ».

Passons sur l’omission volontaire de la première négation (NE poussez pas), qui semble ici reproduire le langage parlé. En revanche, l’oubli de la seconde négation (on N’est pas pressé) est bien plus gênante. Pourquoi ?

Parce que l’oubli du « ne » devant, notamment, les verbes « être » et « avoir » est une faute courante, et qu’une fois encore les médias ne montrent pas l’exemple ! Loin de moi l’idée de jeter la pierre à Oasis, il suffit de regarder TOUS les sous-titrages français de films américains : le « ne »  passe à la trappe à tous les coups. Affiche pub Oasis on est pas presse 2014

Certes, à l’oral, la liaison entre le pronom « on » et la voyelle qui commence le verbe qui suit, donne l’illusion d’une négation (exemple : « on a pas faim » se prononce de la même manière que « on n’a pas faim »). La faute passe donc inaperçue. Mais à l’écrit, impossible de tricher !

Un petit rappel s’impose : en français, la négation se construit en entourant le verbe par « ne…pas », « ne… plus », « ne…point », « ne… guère » ou « ne… jamais ». À noter que « ne » devient « n’ » devant une voyelle par élision.

J’entends déjà celles et ceux qui répondront (Oasis en première ligne) que tout cela a été pensé, que la négation manquante permet de traduire le langage familier. Mais cet argument ne pèse pas lourd quand on voit que les sous-titrages de films qui contiennent la faute reprennent les paroles de personnages ne s’exprimant pas familièrement ! De plus, la nuance est bien trop subtile pour être un effet de style. Autant je peux comprendre la suppression du « ne » (n’) dans la phrase « J’ai pas faim », parce que la sonorité est différente de la tournure en français correct : « Je n’ai pas faim », autant là, il s’agit d’une VRAIE faute, et c’est bien dommage de la part d’une marque qui, d’habitude, manie si bien la langue française.

Dernier point, le fait que le participe passé « pressé » employé avec le pronom « on » soit au singulier peut être objet à discussion. Ne faudrait-il pas l’accorder au pluriel, puisque ce « on » désigne vraisemblablement les fruits et/ou les usagers du métro qui sont les uns comme les autres… pressés ? À moins de considérer qu’ici la formule « on n’est pas pressé » est une expression impersonnelle qui ne vise personne en particulier. Dans cette logique, elle peut s’écrire au singulier, suivant l’exemple du titre de l’émission de Laurent Ruquier On n’est pas couché (abrégé au passage, en « ONPC » avec le « N » de la négation !)*.

Espérons qu’à l’avenir, l’équipe marketing d’Oasis relira sa copy / copie !

* Pour tout savoir sur le pronom « on » et sa règle d’accord, voir le billet On est-il un con ?